Cette présentation propose de réfléchir à la transformation historique de l'espace public de La Havane comme une expression des processus de contestation et de solidarité entre artistes face au contexte politique particulier du pays. Dans un premier temps, nous proposons de penser aux changements du centre historique de cette ville comme l'ancien noyau des rassemblements et des discussions autour de l'Indépendance par rapport à la colonie espagnole dans la deuxième moitié du XIXe siècle, vers sa rénovation comme centre touristique, dépourvu d'une bonne partie de son histoire politique et de contestation à partir des années 1990.

Ensuite, nous discuterons à propos du concept de « ville socialiste » qui exprimeraient supposément les valeurs et les pratiques égalitaires en termes sociaux de ce système, mais que paradoxalement à La Havane, en raison de la crise économique croissante depuis la fin du XXe siècle, a eu tendance à consolider la différenciation entre ses quartiers centraux et aisés et les quartiers plus populaires et périphériques.

Nous continuerons avec un moment historique de changement pour cette ville, l'année 2016, après la visite du président Obama et à partir des autorisations du gouvernement cubain de la petite initiative indépendante cubaine. S'agit-il d'un moment d'opportunité et aussi de ségrégation des quartiers plus périphériques de la ville ? Enfin, nous arriverons à l'année 2019 et le renforcement du contrôle social dans l'espace public dû à la gestion gouvernementale de la Covid-19. À ce moment, une nouvelle remise en question des centres politiques et culturels de La Havane a lieu, à partir de l'action artistique et de la protestation politique du Mouvement San Isidro, centré sur un quartier périphérique du même nom à La Havane. Nous discuterons de la manière dont ce mouvement déclenche des mobilisations et des manifestations d'artistes (mouvement 27N) et de citoyens cubains (manifestation du 11 juillet 2021), lesquels remettent en question l'idée d'une Havane qui n'échappe pas à la segmentation sociale d'autres villes latino-américaines, tout en observant l'augmentation du contrôle politique de son espace public.